Un couple, rêvant d’acquérir sa résidence principale, se retrouve face à un dilemme financier. Disposant de revenus de capitaux mobiliers, ils hésitent à les utiliser pour constituer un apport, craignant l’influence de l’imposition au barème progressif sur leurs finances et leur capacité d’emprunt. Cette situation, loin d’être isolée, soulève une question cruciale pour de nombreux aspirants propriétaires.

Les revenus de capitaux mobiliers (RCM), englobant les dividendes, les intérêts et les plus-values mobilières, sont soumis à différents régimes d’imposition, notamment le prélèvement forfaitaire unique (PFU), souvent appelé “flat tax”, et le barème progressif de l’impôt sur le revenu.

Alors, l’imposition au barème des RCM constitue-t-elle un véritable obstacle à l’acquisition immobilière ? Comment les futurs acquéreurs peuvent-ils optimiser leur situation fiscale pour réaliser leur rêve et concrétiser leur projet immobilier ? Nous allons explorer les mécanismes de cette imposition, analyser ses conséquences directes sur la capacité d’emprunt et, surtout, dévoiler des stratégies d’optimisation fiscale pour faciliter l’achat immobilier.

Comprendre l’imposition au barème des revenus de capitaux mobiliers

Avant de plonger dans les conséquences concrètes, il est essentiel de maîtriser les bases de l’imposition au barème des RCM. Cette section détaillera le fonctionnement du barème progressif de l’impôt sur le revenu, les types de RCM concernés et les conditions pour opter pour ce régime, ainsi que les abattements et déductions possibles.

Fonctionnement du barème progressif de l’impôt sur le revenu

Le barème progressif de l’impôt sur le revenu est un système où le taux d’imposition augmente en fonction du niveau de revenu. Il est divisé en tranches, chacune associée à un taux d’imposition spécifique. Le quotient familial, qui tient compte de la situation familiale du contribuable (nombre d’enfants à charge, etc.), permet d’adapter le revenu imposable et donc l’impôt à la situation de chaque foyer. La progressivité du barème signifie que les revenus les plus élevés sont imposés à des taux plus importants. En 2024, le barème progressif est le suivant (source : impots.gouv.fr ) :

Tranche de revenu imposable (par part) Taux d’imposition
Jusqu’à 11 294 € 0%
De 11 295 € à 28 797 € 11%
De 28 798 € à 82 341 € 30%
De 82 342 € à 177 106 € 41%
Plus de 177 106 € 45%

L’ajout de RCM peut avoir un effet significatif sur l’impôt dû, car il augmente le revenu imposable et peut faire basculer un contribuable dans une tranche d’imposition supérieure. Ce basculement peut entraîner une augmentation plus importante de l’impôt que le simple taux appliqué aux RCM. Cette situation doit être anticipée pour une meilleure gestion de votre fiscalité et de votre projet d’achat immobilier.

RCM concernés par l’imposition au barème : conditions et option

Tous les revenus de capitaux mobiliers ne sont pas obligatoirement imposés au barème progressif. Le contribuable a le choix, lors de sa déclaration de revenus, d’opter soit pour le Prélèvement Forfaitaire Unique (PFU) à 12,8% (hors prélèvements sociaux), soit pour l’imposition au barème progressif. Les RCM concernés par cette option sont principalement les dividendes et les plus-values mobilières, mais aussi certains types d’intérêts. L’option pour le barème peut être avantageuse dans plusieurs cas :

  • Si le contribuable se situe dans une tranche d’imposition basse (0% ou 11%).
  • Si le contribuable peut bénéficier d’abattements importants, notamment l’abattement de 40% sur les dividendes de sociétés françaises.

Il est crucial de noter que l’option pour le barème progressif est globale et s’applique à l’ensemble des RCM du foyer fiscal. Il n’est pas possible de choisir le barème pour certains RCM et le PFU pour d’autres. Il est donc impératif d’évaluer l’impact de cette option sur l’ensemble de vos revenus.

Calcul de l’impôt sur les RCM au barème : abattements et déductions

Le calcul de l’impôt sur les RCM au barème progressif prend en compte les abattements et déductions possibles. Pour les dividendes de sociétés françaises, un abattement de 40% est appliqué sur le montant brut. Certaines charges, comme les frais de garde de titres, peuvent également être déduites des RCM. Il est donc essentiel de bien déclarer tous ces éléments pour optimiser l’imposition et réduire le montant de l’impôt dû. Voici quelques exemples pour illustrer ce calcul :

Exemple 1: Un contribuable célibataire percevant 5 000 € de dividendes de sociétés françaises. Il bénéficie d’un abattement de 40%, soit 2 000 €. Le revenu imposable est donc de 3 000 €. S’il se situe dans la tranche d’imposition à 11%, l’impôt sur ces dividendes sera de 330 €. En revanche, si ces mêmes dividendes étaient soumis au PFU, l’impôt serait de 640 € (5 000 € x 12,8%).

Exemple 2: Un couple marié (2 parts fiscales) perçoit 10 000€ de dividendes de sociétés françaises et a des frais de garde de titres de 500€. L’abattement de 40% est de 4000€, donc le revenu imposable est de 6000€. Après déduction des frais de garde, le revenu imposable est de 5500€. Selon leur tranche d’imposition, l’impôt sera calculé sur cette base.

Ces exemples montrent l’importance de bien prendre en compte les abattements et les frais déductibles pour minimiser l’imposition de vos revenus mobiliers. Consulter un conseiller fiscal peut vous aider dans cette démarche.

L’impact direct sur la capacité d’achat immobilier

L’imposition des RCM au barème progressif peut avoir un impact non négligeable sur la capacité d’acquérir un bien immobilier. Cette section examinera comment cette imposition réduit le revenu disponible pour l’apport personnel, influence le taux d’endettement et la capacité d’emprunt, et comment les banques prennent en compte les RCM dans leurs analyses.

Diminution du revenu disponible pour l’apport personnel

L’impôt sur les RCM réduit directement le montant disponible pour constituer un apport personnel. Un apport personnel plus faible signifie un emprunt plus élevé, des mensualités plus importantes et un coût total du crédit plus élevé. La différence entre l’imposition au PFU et au barème peut être significative, comme le montre l’exemple suivant :

Scénario Imposition au PFU (12,8%) Imposition au barème (30%)
Revenu de capitaux mobiliers 10 000 € 10 000 €
Impôt 1 280 € 3 000 €
Montant disponible pour l’apport 8 720 € 7 000 €

Dans cet exemple, l’imposition au barème réduit le montant disponible pour l’apport de 1 720 €, ce qui peut avoir une incidence sur le montant empruntable et les conditions du prêt. Un apport plus conséquent permet de négocier un taux d’intérêt plus avantageux et de réduire le coût total du crédit.

Influence sur le taux d’endettement et la capacité d’emprunt

Le taux d’endettement maximum autorisé est généralement de 35% des revenus nets. L’impôt sur les RCM, en diminuant le revenu net imposable pris en compte par la banque, peut réduire la capacité d’emprunt. Par exemple, si un couple a des revenus mensuels de 4 000 € et des RCM imposés au barème qui réduisent leur revenu net de 500 €, leur capacité d’emprunt sera calculée sur la base de 3 500 €, ce qui peut se traduire par une diminution significative du montant qu’ils peuvent emprunter. La capacité d’emprunt peut se calculer comme suit :

  • Calcul du revenu mensuel net : Revenu brut annuel / 12 mois – Impôts et charges sociales
  • Calcul de la mensualité maximale : Revenu mensuel net x Taux d’endettement maximal (35% en général)
  • Estimation du montant empruntable : Mensualité maximale / (Taux d’intérêt mensuel / (1 – (1 + Taux d’intérêt mensuel)^(-Nombre de mensualités)))

Les banques analysent avec attention les revenus des emprunteurs, et la manière dont elles considèrent les RCM peut varier en fonction de leur caractère stable et régulier. Les banques peuvent exiger des justificatifs prouvant la stabilité des RCM sur plusieurs années afin de les prendre en compte dans le calcul de la capacité d’emprunt. L’utilisation de ces revenus pour augmenter l’apport initial est une stratégie à étudier selon le profil de chaque personne et selon ses objectifs d’achat immobilier.

Le rôle des banques et des organismes de crédit : prise en compte des RCM

Les banques analysent attentivement les revenus des emprunteurs, y compris les RCM. Cependant, elles peuvent ne pas prendre en compte la totalité des RCM dans le calcul du revenu, en raison de leur caractère variable. Certaines banques peuvent exiger des justificatifs de stabilité des RCM sur plusieurs années avant de les intégrer dans le calcul de la capacité d’emprunt. De plus, les banques peuvent appliquer une décote sur les RCM pour tenir compte du risque de fluctuation. En moyenne, les banques prennent en compte entre 50% et 80% du montant des RCM (source : MeilleurTaux.com ), en fonction de leur régularité et de la politique de chaque établissement.

Stratégies d’optimisation fiscale pour faciliter l’achat immobilier

Heureusement, il existe des stratégies d’optimisation fiscale pour atténuer l’influence de l’imposition au barème des RCM sur l’achat immobilier. Cette section explorera la comparaison entre le PFU et le barème, l’optimisation de la gestion du portefeuille, le recours à l’investissement locatif et l’importance du conseil financier.

Comparaison PFU vs barème : choisir le régime le plus adapté

Le choix entre le PFU et le barème progressif dépend de la situation personnelle de chaque contribuable. Le PFU, avec son taux fixe de 12,8% (hors prélèvements sociaux), est souvent plus simple et plus prévisible. Le barème progressif peut être plus avantageux pour les contribuables faiblement imposés ou bénéficiant d’abattements importants. Pour bien choisir, il est important de considérer :

  • Le montant total des RCM.
  • La tranche d’imposition du contribuable.
  • L’existence d’abattements (ex : 40% sur les dividendes).

Un tableau comparatif peut aider à visualiser les avantages et inconvénients de chaque régime :

Régime Avantages Inconvénients
PFU (12,8%) Simplicité, prévisibilité, adapté aux contribuables fortement imposés. Pas d’abattement, taux fixe plus élevé pour les contribuables faiblement imposés.
Barème progressif Abattements possibles, taux d’imposition plus faible pour les contribuables faiblement imposés. Complexité, imposition plus élevée si le contribuable bascule dans une tranche supérieure.

Optimiser la gestion de son portefeuille pour minimiser l’impact fiscal

Une gestion optimisée du portefeuille peut permettre de minimiser l’impact fiscal des RCM. Il existe plusieurs stratégies à envisager :

  • Privilégier les placements défiscalisés (PEA, assurance-vie après 8 ans, PER).
  • Arbitrer les placements en tenant compte de l’impact fiscal des plus-values.
  • Envisager la donation de titres à des enfants majeurs pour bénéficier d’abattements sur les droits de donation.

Par exemple, le Plan d’Épargne en Actions (PEA) permet de bénéficier d’une exonération d’impôt sur les plus-values et dividendes après 5 ans de détention (hors prélèvements sociaux). Le PEA est particulièrement intéressant pour les investissements en actions européennes. L’assurance-vie, après 8 ans, offre également une fiscalité avantageuse, avec un abattement annuel sur les intérêts et plus-values en cas de rachat. Le PER (Plan Epargne Retraite) permet de déduire de son revenu imposable les versements effectués, dans certaines limites.

Le recours à l’investissement locatif : une alternative ?

L’investissement locatif peut être une alternative intéressante pour générer des revenus complémentaires et bénéficier de réductions d’impôt. Les dispositifs comme Pinel (remplacé par le Pinel + en 2023 et amenant à sa disparition) ou Denormandie offrent des avantages fiscaux en contrepartie d’un engagement de location. Les revenus fonciers, bien que soumis à l’impôt, peuvent être compensés par des charges déductibles, comme les intérêts d’emprunt et les travaux. Le taux de rendement moyen d’un investissement locatif se situe entre 3% et 5% brut par an (source : INSEE ), selon la localisation et le type de bien.

Anticiper et planifier : l’importance du conseil financier

L’optimisation fiscale est un domaine complexe, et il est fortement recommandé de se faire accompagner par un conseiller financier. Un conseiller peut aider à déterminer le régime d’imposition le plus adapté, à choisir les placements les plus appropriés et à anticiper les conséquences fiscales de l’achat immobilier. Un conseiller financier peut également aider à élaborer une stratégie patrimoniale globale, en tenant compte de tous les aspects de la situation financière du contribuable. N’hésitez pas à prendre rendez-vous pour une consultation personnalisée.

Études de cas

Les études de cas suivantes sont fictives et servent uniquement à illustrer les concepts présentés dans cet article.

Cas de Marie: Marie, jeune active qui souhaite acheter son premier appartement, a 5000€ de revenus de capitaux mobiliers par an. Elle est dans la tranche à 11%. L’imposition au barème lui coûtera 220€ + les prélèvements sociaux, là où le PFU lui coûterait 640€ + les prélèvements sociaux. Le barème progressif est donc plus intéressant pour Marie.

Cas de Bernard: Bernard, qui a un revenu imposable élevé, dans la tranche à 41%, a également 5000€ de revenus de capitaux mobiliers par an. L’imposition au PFU lui coûtera 640€ + les prélèvements sociaux, là où le barème lui coûterait 2050€ + les prélèvements sociaux. Le PFU est donc plus intéressant pour Bernard.

En résumé : un achat immobilier optimisé grâce à une bonne gestion fiscale

L’imposition au barème des revenus de capitaux mobiliers peut avoir un impact significatif sur la capacité d’achat immobilier, en réduisant le revenu disponible pour l’apport personnel et en influençant le taux d’endettement. Cependant, des stratégies d’optimisation fiscale existent pour atténuer cet impact, comme le choix du régime d’imposition le plus adapté (PFU vs barème progressif), l’optimisation de la gestion du portefeuille grâce aux placements défiscalisés, et le recours à l’investissement locatif.

Il est donc crucial d’analyser sa situation personnelle et de se faire accompagner par un professionnel pour prendre les meilleures décisions et réaliser son projet immobilier dans les meilleures conditions possibles. Les revenus de capitaux mobiliers ne doivent pas être un frein à l’achat, mais plutôt une source de financement à optimiser. N’hésitez pas à consulter un conseiller financier pour élaborer une stratégie personnalisée et atteindre vos objectifs immobiliers.